Parcours Européens à Rouen.

Parcours Mouvement Européens à Rouen.
Centre Historique de Rouen Rouen Métropole : au Nord de la Seine

Le Chai à vin de Rouen
Un monument emblématique de notre patrimoine portuaire

En 1950, le premier chai d’Europe

Cet entrepôt, inauguré en décembre 1950 par la Chambre de Commerce et d’Industrie de Rouen, est à l’époque le 1er chai d’Europe.  Il sert à l’importation de vins algériens et à leur redistribution, par le transport fluvial, sur le marché parisien. Le commerce du vin (et des céréales) a toujours été une activité au cœur des ports européens, depuis le Moyen-Âge. Le champ de foire aux boissons, à Rouen, à la hauteur de l’avenue Pasteur, alignait les  tonneaux  débarqués (années 1920-30). Ils ont été pendant longtemps des éléments incontournables du paysage portuaire européen, de Bordeaux à Londres, de Porto à Lübeck, de Venise à la vallée rhénane …

Les cuves étaient raccordées par des canalisations aux postes de déchargement du quai de la Seine, ainsi qu’au bassin Saint-Gervais.

Le bâtiment en brique et  béton, est construit par Pierre-Maurice Lefebvre, architecte rouennais. Il est situé sur la presqu’île Waddington, entre la Seine et le bassin Saint-Gervais, emplacement idéal pour organiser un transbordement du vin des navires de mer aux péniches remontant la Seine, ou aux camions. Il conserve cette fonction jusqu’en 1968 ; l’indépendance de l’Algérie en 1962 et la réduction de l’activité viticole de la plaine de la Mitidja obligent la Chambre de Commerce et d’Industrie de Rouen à réduire, puis arrêter cette activité d’importation. L’amélioration de la qualité des vins du Languedoc, dont le vignoble produisait un vin de consommation courante, d’assez faible teneur en alcool, qui nécessitait un coupage avec les vins d’Algérie très forts en alcool, condamne à terme ce trafic.

Chargement de camions citerne transportant le vin.

Le bâtiment est cédé au Port autonome de Rouen qui l’utilise jusqu’en 1993 comme bureau des Douanes. Depuis cette date, il est désaffecté. Il a été malheureusement vandalisé, sa tuyauterie en cuivre suscitant des convoitises ; le rez-de-chaussée est finalement muré afin d’éviter des dégradations supplémentaires …

En 2017, dans le cadre de l’opération «Réinventer la Seine» lancée par les 3 grandes villes le long de la Seine, le Havre, Rouen et Paris, le projet de le transformer en casino est retenu. Ce projet est finalement abandonné récemment, abandon controversé.

On s’interroge de nouveau sur la destination de ce bel édifice de la période dite de « reconstruction », actuellement à l’état de friche portuaire.

Une architecture audacieuse et bien pensée

Le chai à vin, côté sud.

La façade est sobre, en briques de teinte orange, avec des ornementations en chaînes de briques et peu d’ouvertures, sauf au rez-de-chaussée et au-dessus du bâtiment. Le bâtiment est donc protégé des écarts de température qui pourraient endommager le vin. Le jour pénètre seulement par le rez-de-chaussée et le shed qui diffuse avec modération dans le bâtiment de la lumière zénithale. La brique, bon isolant, rappelle les entrepôts voisins sur les quais.

Ce bâtiment à l’aspect assez massif cache bien son jeu ! L’architecte réussit en effet la prouesse que permet le béton, de dégager des espaces intérieurs clairs et aérés, un peu dans la lignée d’Auguste Perret (qui reconstruit Le Havre), grâce à un entrecroisement de piliers et une savante disposition des cuves et portiques. Serait-ce le bâtiment le plus havrais de Rouen ? Un beau trait d’architecte en tout cas et un trait d’union entre les deux cités ?

À l’intérieur, il se compose de trois étages de cuves pouvant recevoir 100 000 hectolitres. Ces étages, disposés en croix, sont desservis par des passerelles.
La « nef centrale » est octogonale et le plan est en croix grecque, clin d’œil de l’architecte du Nord à la civilisation méditerranéenne ? Cette nef centrale n’est pas sans rappeler d’ailleurs l’intérieur de l’église Saint-Joseph du Havre, construite par Auguste Perret, suivant une technique un peu similaire. Malgré les dégradations, les tags, on se prend à rêver d’un espace dédié à la création contemporaine …

Que faire de cette friche portuaire ? Imaginons l’avenir !

La vue d’artiste ci-contre permet de se rendre compte de l’ampleur des volumes disponibles dans cet édifice qui offre 4 plateaux « à la Guggenheim », utilisables pour des expositions, voire des spectacles. La lumière tamisée du shed (orienté nord) en fait un bâtiment avec des qualités isothermiques certaines … Le plateau extérieur permettrait, sur le toit,  d’accueillir un restaurant avec une vue imprenable sur le port de Rouen.

Concert au chai, en 1991, dans le cadre du festival Octobre en Normandie.

Le Chai pourrait devenir un centre d’art contemporain, qui manque à Rouen, un lieu central pour les arts innovants (CHAI, comme Centre d’Histoire des Arts Innovants). Dans le cadre de Rouen, Capitale Européenne de la Culture, en 2028 , le chai, en alliant l’Art et l’Industrie, serait dans la continuité d’une tradition rouennaise et européenne d’innovation, illustrée en son temps par les Impressionnistes. Que l’on songe, par exemple, à Claude Monet et sa Gare Saint-Lazare (1877).

 

Sources

Pour y aller

1 Commentaire

  1. Superbe exposé.
    Il faut réfléchir pour trouver les moyens de faire de ce bâtiment et de toute la zone située aux alentours un lieu d’attraction et de promenade, tout en préservant les possibilités de la foire annuelle.

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